16h12 CET
13/01/2025
La retraite de Nikola Karabatic, son symbole pendant près de deux décennies, place l'équipe de France de handball, qui entame son Mondial mardi, face à un certain vide, davantage sur le plan marketing que sportif.
Pour la première fois depuis depuis 23 ans - à l'exception du Mondial-2021 pour lequel il était blessé -, les Bleus vont disputer une compétition sans celui qui est considéré comme le meilleur joueur de l'histoire.
Karabatic, qui a pris sa retraite cet été à 40 ans, était selon Nedim Remili "l'icône de notre génération, voire même de plusieurs générations", celles de ces handballeurs français qui ont régné sur une bonne partie du XXIe siècle.
Et probablement le seul joueur connu en France au-delà du petit cercle de la "balle collante", comme avant lui Jackson Richardson, première icône tricolore, dans les années 1990.
Tous deux "incontestablement ont accéléré la notoriété de notre sport", estime auprès de l'AFP Philippe Bana, président de la Fédération française de handball (FFHandball).
"Les gens ne connaissant pas le handball connaissaient Niko Karabatic", souligne de son côté le demi-centre Aymeric Minne.
Pour François-Xavier Houlet, ex-international et actuel consultant pour BeIN Sports, Karabatic "laisse un grand vide forcément et presque malgré lui, parce que ce n'était pas quelqu'un qui recherchait obligatoirement la lumière ou qui avait une appétence pour les +punchlines+".
"Il était relativement discret, à la fois en dehors et avec l'équipe", ajoute-t-il à l'AFP.
- "Qui mettons-nous en avant ?" -
L'équipe de France, justement, ne tournait plus autour de lui depuis plusieurs années, emmenée par Dika Mem, Nedim Remili ou encore Ludovic Fabregas.
Mais la figure tutélaire de l'aîné des Karabatic, a priori le seul handballeur dont la carrière (avec celle de son frère Luka) a été racontée dans une bande dessinée (dont le tome 1 est paru fin 2024), manquera au handball français sur les plans médiatique et marketing.
"Les médias s'interrogent, de très gros partenaires nous ont interrogés ces dernières semaines: +Mais alors avec qui passe-t-on des contrats individuels ?+, +Qui mettons-nous en avant ?", raconte ainsi Philippe Bana.
Réponse: personne et tout le monde à la fois. Parce que devenir le porte-drapeau d'un sport ne se décrète pas, mais s'impose éventuellement progressivement de l'extérieur, subtil cocktail entre les performances collectives (les Bleus de Richardson et Karabatic ont remporté des titres) et individuelles, et l'image renvoyée.
- "Marque d'équipe" -
Dika Mem et Nedim Remili, tauliers depuis plusieurs années, ou Elohim Prandi, dont le coup franc pour arracher la prolongation à la dernière seconde en demi-finale de l'Euro-2024 contre la Suède est passé à la postérité, ont le profil.
"(Prandi) a aussi une personnalité, un look, une présence, un jeu un peu particulier et son niveau de jeu est assez extraordinaire", souligne Houlet.
Mais selon l'ancien international, pousser en avant une vedette n'est pas dans les gênes du handball français: "A chaque fois, cela a été freiné, par le groupe ou le joueur lui-même. Même à l'époque de +Jack+" (Richardson, avec qui il a joué) quand la balle collante devait se faire connaître du grand public.
"L'époque de Jackson était difficile parce qu'il portait tellement notre sport que pour les autres, c'était une forme d'ombre", se souvient Philippe Bana, DTN de la fédération de 1999 à 2020 avant d'en prendre la présidence.
"Aussi, on a fait très attention avec Claude Onesta (sélectionneur de 2002 à 2016, NDLR), à partir de l'arrivée dans l'équipe de Nikola Karabatic, à ce qu'il y ait plusieurs porte-drapeaux", ajoute-t-il.
Plusieurs joueurs ont été mis en avant dans les campagnes de communication car, poursuit Bana, "une marque d'équipe est peut-être plus durable qu'une marque individuelle". Quand bien même Nikola Karabatic a finalement davantage attiré la lumière.